
À chaque rentrée scolaire, la course aux fournitures bat son plein. Si le coût et l'aspect pratique guident souvent le choix des familles, les questions de sécurité sanitaire et de l'impact environnemental de ces produits du quotidien deviennent des préoccupations majeures. Entre la présence de substances chimiques potentiellement nocives et des étiquettes "vertes" parfois trompeuses, un examen attentif est plus que jamais nécessaire.
La face cachée des fournitures : des substances toxiques dans les cartables
Crayons, colles, feutres, gommes... ces outils indispensables à l'apprentissage ne sont pas aussi inoffensifs qu'ils n'y paraissent. Depuis plusieurs années, des études menées par des agences sanitaires tirent la sonnette d'alarme. L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a notamment publié des expertises révélant la présence de nombreuses substances chimiques dangereuses dans les fournitures scolaires.
Parmi les composés les plus fréquemment identifiés figurent :
- Les phtalates, des perturbateurs endocriniens avérés, souvent présents dans les plastiques souples comme les gommes ou les protège-cahiers.
- Les composés organiques volatils (COV), tels que le formaldéhyde, le toluène ou le benzène, qui peuvent s'échapper des colles, des vernis de crayons ou des encres et provoquer des irritations des voies respiratoires.
- Les nitrosamines, classées comme cancérigènes probables, détectées dans certaines gommes.
- Les métaux lourds (plomb, cadmium, chrome) et les colorants allergisants que l'on peut retrouver dans les peintures, les feutres ou les crayons de couleur.
- Les parfums, qui, au-delà de leur inutilité, peuvent être une source d'allergies.
- L'exposition à ces substances est d'autant plus préoccupante qu'elle concerne des enfants, un public particulièrement vulnérable. Le contact cutané répété, l'inhalation ou encore le "mâchouillage" des stylos et crayons augmentent les risques d'imprégnation.
Le "greenwashing" s'invite dans les rayons
Face à une demande croissante des consommateurs pour des produits plus respectueux de l'environnement, de nombreux fabricants ont verdit leur communication. Allégations "écologique", "naturel", "recyclé" ou encore emballages aux couleurs de la nature fleurissent sur les produits de la rentrée. Cependant, la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) met en garde contre le "greenwashing" ou éco-blanchiment.
Une enquête de la DGCCRF a ainsi révélé que si le taux d'anomalies n'est pas extrêmement élevé, de nombreuses mentions manquent de transparence et de précision. Il peut s'agir de logos auto-proclamés sans certification officielle, de pourcentages de matière recyclée non vérifiables ou d'allégations vagues comme "respectueux de l'environnement" qui, depuis la loi Climat et résilience, sont interdites si elles ne sont pas dûment justifiées.
Un vide réglementaire à combler
L'une des raisons principales de cette situation réside dans un paradoxe réglementaire majeur au niveau européen. Alors que les jouets sont soumis à une directive très stricte (2009/48/CE) qui interdit ou limite fortement l'usage de substances cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR), les fournitures scolaires échappent à ce cadre.
L'Anses, ainsi que l'Afoc, plaident pour une extension de cette réglementation à l'ensemble des fournitures scolaires. Une telle mesure obligerait les fabricants à revoir la composition de leurs produits et garantirait un niveau de sécurité bien plus élevé pour les enfants.
Conseils pratiques pour une rentrée plus saine et plus verte
En attendant une évolution de la législation, la vigilance des parents est essentielle. Voici quelques recommandations pour faire des choix éclairés :
- Privilégier la simplicité : Évitez les articles aux couleurs ou aux odeurs trop vives et les gadgets parfumés, qui contiennent souvent des substances chimiques superflues.
- Décrypter les étiquettes : Recherchez des produits porteurs de labels environnementaux officiels et reconnus, qui garantissent à la fois une limitation de l'impact environnemental et des exigences sanitaires. Parmi les plus fiables, on trouve l'Écolabel européen, la marque NF Environnement, ou encore les labels forestiers FSC et PEFC pour les articles en papier et en bois.
Choisir les bons matériaux :
- Colles : Préférez les colles à base d'eau ou végétales, sans solvants.
- Crayons : Optez pour des crayons en bois non verni et des surligneurs secs plutôt que fluorescents.
- Gommes : Privilégiez celles en caoutchouc naturel.
- Feutres et stylos : Choisissez des produits à base d'eau.
- Aérer : Une fois les achats effectués, il est conseillé de déballer les fournitures et de les aérer quelques jours avant la rentrée pour permettre aux COV de se dissiper.
En somme, si le risque zéro n'existe pas, une consommation plus avertie et plus exigeante peut significativement réduire l'exposition des enfants aux substances nocives et déjouer les pièges du marketing environnemental. Le cartable de la rentrée peut ainsi devenir une première leçon de consommation responsable.