Loyers impayés : une nouvelle procédure accélérée pour le prélèvement à la source

17 septembre 2025
Logement

Depuis le 1er juillet 2025, une nouvelle procédure de saisie sur les rémunérations, plus rapide et dématérialisée, permet aux propriétaires de recouvrer les sommes dues directement sur le salaire de leurs locataires défaillants, sans avoir à obtenir une autorisation préalable du juge. Cette mesure phare, issue d'un décret du 12 février 2025, vient compléter l'arsenal législatif renforcé par la loi du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite.

Cette réforme majeure a pour double objectif de désengorger les tribunaux et d'offrir aux bailleurs une solution plus efficace et rapide pour récupérer leur dû. En confiant la totalité de la procédure aux commissaires de justice (ex-huissiers de justice), le gouvernement entend réduire des délais de recouvrement qui pouvaient s'étirer sur de nombreux mois, voire des années.

 

Le contexte : la loi "anti-squat" et la volonté d'accélérer les procédures

La nouvelle procédure de saisie sur salaire s'inscrit dans un mouvement législatif plus large visant à mieux protéger les propriétaires. La loi du 27 juillet 2023, dite "anti-squat", avait déjà posé plusieurs jalons en ce sens. Elle a notamment rendu systématique l'insertion d'une "clause résolutoire" dans les baux d'habitation. Cette clause permet de résilier le bail de plein droit en cas de non-paiement du loyer, des charges ou du dépôt de garantie, accélérant ainsi la procédure d'expulsion.

La loi a également renforcé les sanctions contre les locataires qui se maintiennent dans les lieux après une décision d'expulsion définitive et a clarifié le rôle des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (Ccapex).

 

La nouvelle procédure de saisie sur salaire étape par étape

La nouveauté principale réside dans la déjudiciarisation de la saisie sur les rémunérations. Auparavant, après avoir obtenu un jugement condamnant le locataire, le propriétaire devait retourner devant le juge de l'exécution pour obtenir l'autorisation de faire pratiquer une saisie sur salaire. Cette étape est désormais supprimée.

 

Voici les étapes clés de la nouvelle procédure :

  • L'obtention d'un titre exécutoire : c'est le prérequis indispensable. Le propriétaire doit détenir une décision de justice (un jugement) ou un autre acte notarié revêtu de la formule exécutoire qui constate une créance liquide et exigible.
  • Le commandement de payer : muni de ce titre, le propriétaire mandate un commissaire de justice qui signifie au locataire un "commandement de payer". Cet acte informe le locataire de la dette et lui laisse un délai d'un mois pour :
  1.  Régler la totalité de sa dette.
  2. Trouver un accord amiable avec le bailleur (par exemple, un échéancier de paiement).
  3.  Saisir le tribunal pour contester la dette s'il l'estime infondée
  • La saisie sur salaire : si le locataire ne réagit pas dans le mois imparti, le commissaire de justice peut alors procéder à la saisie. Il établit un procès-verbal de saisie qu'il notifie à l'employeur du locataire.
  • Le rôle de l'employeur et du commissaire de justice répartiteur : l'employeur est tenu de retenir chaque mois la part saisissable du salaire de son employé et de la verser au commissaire de justice. Un barème légal définit la quotité saisissable en fonction du niveau de rémunération, garantissant au débiteur de conserver un montant minimum équivalent au Revenu de Solidarité Active (RSA). Un commissaire de justice répartiteur, spécialement formé, est ensuite chargé de vérifier les montants, de les répartir entre les éventuels créanciers et d'informer les parties. Un registre national des saisies a été créé pour assurer la traçabilité et la transparence des opérations.

 

Droits et obligations des parties

Si cette procédure renforce les moyens d'action des propriétaires, elle préserve les droits du locataire. Le délai d'un mois suivant le commandement de payer lui offre une dernière opportunité de régulariser sa situation à l'amiable ou de faire valoir ses arguments devant un juge.

L'employeur, quant à lui, a l'obligation de coopérer à la procédure de saisie. Il ne peut en aucun cas sanctionner ou discriminer un salarié faisant l'objet d'une telle mesure.

 

Conséquences et implications

Pour les bailleurs, le principal avantage de cette réforme est la réduction significative des délais de recouvrement, qui pourraient passer de plusieurs mois à moins de deux mois après l'obtention du titre exécutoire. La centralisation de la procédure entre les mains du commissaire de justice simplifie également les démarches.

Pour les locataires, cette procédure peut être perçue comme plus comminatoire. La rapidité de la saisie sur salaire après le commandement de payer les incite à réagir promptement pour ne pas voir leur revenu amputé.

En conclusion, cette nouvelle procédure de prélèvement des loyers impayés constitue un changement de paradigme dans le rapport entre bailleurs et locataires. En accélérant et en simplifiant le recouvrement forcé des créances, elle offre aux propriétaires un outil potentiellement très efficace. Son impact sur la prévention des impayés et sur la relation locative dans son ensemble sera à observer attentivement dans les mois et années à venir.